Tout commence par un diplôme en sciences politiques puis un master 2 sur le thème de la discrimination et des relations interethniques, et une rencontre : celle de Louis Schweitzer, dont elle est chef de cabinet à la Halde, après un an et demi au sein de l’institution. S’enchaînent ensuite plusieurs expériences dans les secteurs du logement et de l’agriculture, entre autres, suivies de trois années en cabinets ministériels. À tout juste 38 ans, Cihem Gharbi a vécu plusieurs vies professionnelles. Leurs points communs : un goût immodéré pour la communication et la politique, assorti d’une profonde envie de façonner les politiques publiques au service de l’intérêt général.
Aujourd’hui directrice du pôle Influence de l’agence Unicorp, elle dévoile les qualités indispensables de tout bon lobbyiste et nous explique ce qui fait le sel de cette discipline à part entière. Rencontre.

Si vous deviez définir le lobbying en quatre mots ?

Je dirais « démonstration », « conviction », « reconnaissance » et « intérêt ».
Ces quatre termes résument parfaitement en quoi consiste le lobbying : faire la démonstration d’une expertise pour convaincre et être reconnu, dans le but de servir des intérêts légitimes.

Quel a été votre parcours professionnel avant de rejoindre Unicorp ?

Ma carrière débute à la Halde (Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité). Très intéressée par les politiques publiques au service de l’intérêt général, j’y entre en tant que stagiaire. Je suis ensuite missionnée au bureau des relations internationales, puis au service communication avant de devenir chef de cabinet de Louis Schweitzer, son président. Cette mission est extrêmement marquante. Louis Schweitzer m’insuffle un véritable goût pour le travail politique. J’apprends à construire et à véhiculer des messages, à faire le tri entre les combats qu’il est possible de mener et ceux voués à l’échec. J’anime également les débats au sein des instances de décision.

Au bout de cinq ans, la présidence de la Halde change. Pour réfléchir au devenir politique de certains secteurs d’activité, il me semble fondamental de bien les appréhender. Je rejoins donc un cabinet d’architecture chargé de réfléchir à la ville du XXIe siècle, puis un syndicat agricole en prise directe avec l’État, dans le cadre des négociations de la PAC.

En 2015, j’intègre le ministère de l’Économie et des Finances en tant que conseillère presse et communication. Je reste deux ans au secrétariat d’État chargé du Commerce, de l’Artisanat, de l’Économie sociale et solidaire et de la Consommation, avant de devenir conseillère de Christophe Castaner, alors porte-parole du Gouvernement.
L’objectif est de coordonner la communication du Gouvernement, composé de ministres aguerris et de personnes issues de la société civile, afin de servir les politiques publiques en cours de déploiement.

Au bout de trois années en cabinet ministériel, je rejoins la Tunisie où j’aide des acteurs de la société civile à structurer et à présenter leurs projets aux décideurs chargés de construire les politiques publiques.

En revenant en France, j’ai une certitude : je ne travaillerai jamais en agence ! Puis je rencontre Muriel Sola, fondatrice et présidente d’Unicorp. Je suis immédiatement séduite par sa façon d’envisager la communication, autour d’un discours de transparence et de vérité. Sa conception du métier tranche avec l’image que j’avais des grosses structures spécialisées dans ce domaine. Je dirige le pôle Influence d’Unicorp depuis un an et demi, maintenant. 

Pourquoi avoir choisi de faire du lobbying ?

L’idée que l’on puisse faire évoluer les politiques publiques pour les améliorer et servir différents intérêts sociétaux me passionne.

Intervenir à ce niveau de la prise de décision grâce à ses connaissances, son expérience et son expertise est également très grisant à mes yeux.

Je prends en outre beaucoup de plaisir à aider des structures privées et de la société civile à avancer sur leurs problématiques.

Quels outils et compétences techniques faut-il pour exceller dans le lobbying ?

Une véritable rigueur dans le travail, qui ne laisse aucune place à la superficialité.
Chaque problématique doit être envisagée selon une approche méthodique et approfondie.
Analyser finement une question, vérifier et identifier des sources pertinentes, mener à bien des recherches rapidement et précisément : rien ne doit être laissé au hasard. Ces facultés sont essentielles pour construire une stratégie d’influence efficace.

Je dirais ensuite une connaissance aiguisée du milieu politique et de son mode de fonctionnement. J’ai appris le lobbying « sur le terrain ». Mes méthodes ne sont pas forcément conventionnelles, mais elles sont efficaces car je connais parfaitement les mécanismes et les finesses du monde politique.
Je sais quel levier utiliser, comment susciter l’intérêt, comment interpeller pour faire avancer les choses rapidement et dans le bon sens.

Dernier outil et non des moindres : un carnet d’adresses politique riche. Les lobbyistes qui n’ont connu que les agences de communication n’ont pas toujours cette arme à leur disposition. Lorsque l’on connaît des personnalités politiques influentes, quelques coups de fil peuvent parfois suffire pour faire avancer une demande en quelques jours, au lieu de plusieurs mois.

Lobbyiste : un métier à la portée de tous ?

C’est un métier passionnant et grisant… qui requiert, toutefois, certaines qualités incontournables.

Un sens du relationnel aiguisé, doublé d’une vraie force de persuasion, d’abord. Pour performer en matière de lobbying, il faut savoir convaincre et négocier. C’est le nerf de la guerre, ce qui différencie un bon d’un mauvais lobbyiste.

Une force de caractère et une capacité d’adaptation sans égal, ensuite. Chaque interlocuteur est différent. Il faut être capable d’analyser les acteurs en présence, de décrypter une situation ou une question donnée. Il faut savoir monter au créneau quand il le faut ou, au contraire, faire le dos rond, sans jamais se laisser marcher sur les pieds ni se décourager.

Que dire à une entreprise qui envisagerait de se lancer seule dans le lobbying ?

De ne pas se fatiguer pour rien ! Envoyer des mails par-ci par-là en espérant une hypothétique mise en contact est souvent voué à l’échec.

Dans le meilleur des cas, l’entreprise sera black-listée par les décideurs publics visés. Dans le pire scénario, elle écopera d’une amende (et d’une peine de prison pour son représentant, si celui-ci est coutumier du fait). Depuis la promulgation de la loi Sapin 2 en 2016, contacter un décideur pour influencer une politique publique est très réglementé. L’objectif est d’éviter tout conflit d’intérêt et de lutter contre la corruption.

Pourquoi travailler avec une agence de lobbying plutôt qu’une autre ?

La bonne agence est celle qui sait rapidement mettre en relation son client avec les décideurs clés. Chez Unicorp, nous ne cherchons pas à étaler ni à multiplier le nombre de contacts. Nous assumons de sélectionner finement quelques personnalités très influentes pour composer des rendez-vous générateurs d’avancées rapides et concrètes.

En quoi vos expériences passées vous aident-elles à performer en tant que lobbyiste ?

Je connais parfaitement l’ensemble des acteurs en présence puisque j’ai déjà travaillé chez chacun d’entre eux.

L’annonceur, d’abord : je connais ses priorités, son mode de fonctionnement, le temps qu’il a à me consacrer. C’est fondamental pour comprendre immédiatement ses besoins et l’orienter vers des choix judicieux, capables de servir ses intérêts, de contenter sa direction ou son conseil d’administration.

Le décideur, ensuite. Je maîtrise parfaitement les mécanismes du circuit législatif. Je sais comment travaillent un député et un sénateur. Je connais les subtilités techniques nécessaires au dépôt d’un amendement, par exemple : quelle procédure choisir, quels délais respecter, à qui le soumettre pour le faire accepter…
Je connais aussi les affinités des uns et des autres… ce qui m’évite quelques impairs qui pourraient coûter cher !

Le  fait d’avoir travaillé dans les secteurs du logement, de l’agriculture et de l’artisanat, entre autres, m’aide beaucoup également. Lorsque je prends un dossier en main, je maîtrise rapidement le fond des sujets. C’est crucial car il m’arrive souvent de défendre seule les intérêts de mes clients. Je dois pour cela être aussi à l’aise techniquement que politiquement.

Quelle est l’action de lobbying dont vous êtes la plus fière ?

Elle concerne l’un de mes clients du secteur agroalimentaire. Son engagement en matière de recyclage des emballages était important, mais son discours ne le valorisait pas.
Je l’ai d’abord aidé à bâtir un argumentaire RSE visible et engageant.
Un jour, il me confie qu’il tente, sans succès, et depuis plusieurs mois, de rejoindre un dispositif gouvernemental, au même titre que de très grands groupes agroalimentaires.

Vingt-quatre heures plus tard, les démarches étaient engagées et il apparaissait sur la liste des futurs signataires du pacte en question.

Je suis fière d’avoir satisfait sa demande en si peu de temps alors qu’il n’y parvenait pas depuis des mois.
Je suis fière d’avoir permis à une structure de taille moyenne de se hisser au même niveau que les mastodontes de ce marché. On l’oublie souvent : le lobbying n’est pas l’apanage des grands groupes. C’est, au contraire, un moyen puissant de développer voire de pérenniser l’activité d’entreprises de toute taille.
Je suis fière, enfin, d’avoir fait avancer cette cause. D’autres acteurs de ce marché seront peut-être incités à en faire autant. C’est ça aussi, le lobbying.

Unicorp vous accompagne dans le développement de votre stratégie d’influence :

  • Audit, conception et diffusion de vos messages.
  • Approche cartographiée de l’écosystème agile pour donner vie à vos idées et rendre vos messages pertinents.
  • Veille permanente des médias français, des actualités politiques et des secteurs d’activité visés.
  • Analyse pointue du traitement médiatique.
  • Réseau travaillé au quotidien.
  • Mise en place de stratégies sur mesure par des consultants experts seniors.
  • Création de synergies entre les expertises pour répondre à vos enjeux d’influence.